Poser à un Maçon britannique la question du type de travail en Loge, c’est-à-dire du travail que chaque Maçon doit effectuer, pourrait conduire à une réaction de stupéfaction, voire à une totale incompréhension de sa part. Et pourtant c’est bien dans cette contrée que s’est formée la Franc-maçonnerie avant de venir s’implanter sur le continent. Et en cas de doute ou d’interrogation, il est toujours bon de revenir aux sources. Alors quelle réponse ? Pour un Maçon britannique ou Français du Rite Emulation, travailler c’est se mettre dans l’esprit d’un chantier où chacun à sa place, et y travaille avec méthode. Pour ce faire, la solution est l’effort continu d’apprendre par cœur, en fait « avec le cœur », les rituels à tous les grades et de perfectionner sa gestuelle et ses mouvements, de savoir executer correctement les signes et autres secrets de reconnaissance. Et quand il n’y a pas de cérémonie rituelle ou de répétition de perfectionnement au programme, alors les « cahiers Emulation » sont à disposition à tous les grades pour des causeries initiatiques qui permettent d’expliciter des points et de pénétrer méthodiquement dans l’ésotérisme du Rite. Cette méthode s’applique également au Rite Écossais d’Écosse. C’est en cela, que consiste le travail maçonnique, et qui, Tenue après Tenue, fait naître en soi le bienfait de l’initiation.
En France où l’on aime les débats d’idées, des organisations maçonniques ont pris depuis le XIXèmesiècle une direction particulière consistant « à faire du sociétal » ou animer des réflexions intellectuelles parfois non dénuées d’arrières pensées politiques. Elles se sont ainsi orientées vers des pratiques maçonniques hétérogènes au regard de la Maçonnerie traditionnelle. Or même dans des Loges qui ont souhaité rester théoriquement dans l’esprit d’origine, la Loge est parfois vue et utilisée non comme un chantier symbolique, mais comme un lieu de débats sur le mode « de développement personnel » ou de « cours du soir » ou encore un divan pour confessions psychanalytiques. La Loge devient alors un salon pour passer un moment de convivialité ou d’agape, compensant le manque de travail maçonnique.
Attention ! sans travail individuel continu, sans Tenue au « mode chantier », l’effet initiatique est absent. Seules peuvent résulter de ce manque de travail au mieux une amélioration comportementale, au pire des phrases pour dire quelque chose, voire une viduité complète. Il se traduira par une inassiduité en augmentation, des paroles sans puissance initiatique, donc par un affaiblissement continu de la transmission du dépôt traditionnel. Et le risque réel est que la Franc-maçonnerie devienne peu à peu un « mode club » dévitalisé de sa raison d’être originelle : l’initiation.
Or les Loges, à tous les rites et tous les grades, disposent d’outils à puissance initiatique pour le travail réellement maçonnique individuel ou collectif : rituels, instructions par demandes et réponses, textes doctrinaux, tableaux et emblèmes de Loge à contempler ou à dessiner « pour se les mettre dans la tête » et en comprendre le message ésotérique, etc. Ce sont ces outils légués par nos Grands Anciens, qui nous sont utiles pour travailler. Avec ces outils purement maçonniques, les Apprentis et les Compagnons peuvent présenter à chaque Tenue un avancement de leur travail … maçonnique, et les Maîtres, donner l’exemple de leur travail maçonnique. Alors la Loge se met à ressembler vraiment à une Loge maçonnique, et les Frères, à des Maçons.
Pas de Maçonnerie donc sans travail maçonnique individuel et collectif ! Oui, mais pas sur n’importe quoi ni par n’importe quelle méthode ! Seuls comptent le contenu maçonnique et son travail sur le « mode chantier » pour rester et progresser dans ce que nous sommes : des Francs-maçons.
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