Les périodes de crise, comme la pandémie que nous traversons, sont propices soit à l’abattement soit à des remises en cause. Pourquoi la Franc-maçonnerie y échapperait-elle ? Certes l’initiation, si elle est effectivement transmise et vécue comme telle, peut l’aider à traverser sans dommages, comme immuable, les effets dévastateurs des conséquences de ses contraintes dites « sanitaires » et surtout chaotiques, sur les Frères : raréfaction des Tenues où l’on se voyait « en présence physique », annulation de réunions, visioconférences aux connexions souvent hasardeuses, distanciation des Frères par rapport à leur Loge, etc. ; et cela, depuis à présent … deux ans.
Dans un tel contexte propice à la dissolution des liens, à l’affaiblissement de la synergie des collectivités maçonniques et à la focalisation compensatrice sur l’accessoire et les personnes, et non plus sur l’essentiel, comment continuer de « faire des progrès en Franc-maçonnerie » ?
Or tous les rites de la Franc-maçonnerie indiquent au Franc-maçon de « faire des progrès en Franc-maçonnerie ». Dans chaque rite, cette invitation est plus ou moins explicitée ; invitation néanmoins nécessaire à répéter, même si le mot « initiation » ne fait pas ou peu ou plus partie du lexique de certains Francs-maçons. Schématiquement les rites disent : « devenir un homme construit, un bon citoyen du monde, à être juste et droit envers son prochain, secourir les malheureux, être l’ami du pauvre comme du riche s’ils sont vertueux, etc. »
Les fondateurs britanniques de la Franc-maçonnerie spéculative souhaitaient faire des loges « un centre d’union entre ceux qui, sans elle, seraient restés à perpétuelle distance ». C’est pourquoi, ils insistaient sur la nécessité absolue de travailler avec « l'affection fraternelle et le bon accord qui doivent toujours caractériser les Francs-maçons et d’éviter tout différend entre Frères. » Cette intention est toujours en vigueur et centrale dans les pays anglo-saxons. Elle est un programme visant à constituer une élite de sociabilité inter sociale par la grâce de la fraternité de chantier, avant même d’être un foyer de progrès spirituel, puis pour permettre de le réaliser.
L’un de nos rites précise que pour « faire des progrès en Franc-maçonnerie, il faut avoir un vrai désir, du courage et de l’intelligence. » Et pour ce faire, ce rite est construit en plusieurs classes, précisément pour mettre à l’épreuve de ses pratiquants, au fur et à mesure, la réalité et la solidité de « leur désir, de leur courage et de leur intelligence » et examiner s’ils sont prêts à « faire des progrès ».
Quel bilan dresser de ces utiles injonctions, tous rites confondus, depuis le projet d’origine de nos fondateurs qui voulaient créer une union mondiale de fraternité initiatique, jusqu’à nos jours ? Nous nous bornerons au seul espace français.
Que voyons-nous tout au long de l’histoire de la Maçonnerie en France ? Morcellements, scissions, divisions, vulgarisation, déviances, rapports de force et autres détournements du but initiatique de la Maçonnerie. Ces méfaits jalonnent jusqu’à nos jours la vie des loges et des obédiences en France : plus de 150 obédiences recensées, des Grandes Loges « historiques » de multitude aux « salons familiaux » !
L’histoire de la Franc-maçonnerie dans notre pays montre que parallèlement aux bienfaits qu’elle a su et pu apporter, il semble bien que le mal provienne de certains membres des loges qui y aient trouvé le lieu de se disputer alors que, s’ils ne s’étaient jamais connus, ils n’auraient pas eu l’occasion de le faire, et de faire de la Franc-maçonnerie autre chose qu’une société fraternelle initiatique…
Qu’arrive-t-il donc « régulièrement » aux loges en France ? La pratique singulière de l’arriviste, de l’intrigant, imbu de pouvoir, qui consiste à critiquer, désinformer, pressionner, manipuler, attaquer ad hominem et surtout diviser pour tenter de servir des ambitions et asservir son institution et ses Frères, que son handicap mental et intellectuel contraint à se travestir en meneur imaginaire ou donneur de leçons pour nourrir son ego dans l’asservissement de son proche entourage. Ces escrocs (de la pensée) sont bien incapables de construire, car tout ce qui est positif et courageux leur échappe. Et voilà ce qui arrive en France régulièrement, d’où l’émiettement continu de notre paysage maçonnique et l’image désastreuse et faussée que donne la Franc-maçonnerie en France à l’inverse des pays germaniques ou anglo-saxons.
Il y a donc confrontation, souvent violente, entre ceux qui ont « un vrai désir, du courage et de l’intelligence » pour faire des« progrès en Franc-maçonnerie », et ceux qui n’ont qu’un désir … de pouvoir et d’emprise sur des sujets asservis par l’aveuglement et la servitude volontaire, du « courage » … pour casser ce qui existe et accaparer les morceaux à leur profit pour continuer à morceler, et de l’intelligence … pour inventer des problèmes et des querelles. Est-ce là une fatalité française ?
En situations de crise, que la Franc-maçonnerie en France n’a cessé de connaître depuis son introduction au XVIIIe siècle, comme tout corps biologique vivant et attaqué, les Maçons sains savent s’unir pour le débarrasser des agents pathogènes qui agressent les loges et les Frères ; et pour rejeter les cellules malsaines, infectées ou polluées. Dans la spiritualité chrétienne, cela s’appelle la « chute », dont ce mal est une nouvelle forme de sa manifestation satanique. Mais dans cette même spiritualité, il existe aussi l’espérance, tant que règnent encore, auprès d’un petit reste de Francs-maçons sincères, loyaux et véritables, foi et amour de la Franc-maçonnerie initiatique et esprit fraternel.
« Faire des progrès en Franc-maçonnerie », c’est aussi avoir le désir, le courage et l’intelligence de rejeter sans compromission les virus contre-initiatiques à l’extérieur, avec un seul but : défendre et protéger les Frères et les loges, telle une « garde initiatique » vigilante, au nom des valeurs fraternelles prônées par nos illustres fondateurs.
La Grande Loge Indépendante de France a été créée dans un mouvement de recherche de paix, d’harmonie et de silence, et a grandi dans une culture de confrérie initiatique multi-rites traditionnelle qui laisse des espaces de liberté et de respiration maçonnique pour le progrès individuel ou collectif spirituel. Est-elle cependant, à l’abri des maux et des égos, en son sein, qui accablent la Maçonnerie en France ? Qui pourrait l’affirmer ?
Comme toujours dans toutes les sociétés initiatiques ou autres, ce n’est pas le nombre qui compte, c’est la qualité humaine des Maçons qui seule en fait leur valeur et garantit celle du « progrès en Franc-maçonnerie ».
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